Face aux plans d’austérité des universités, l’inquiétude des étudiants partout en France

Les coupes budgétaires qui frappent de nombreuses universités les placent dans une situation financière difficile en ce début d'année. Des mouvements étudiants ont émaillé le territoire français ces dernières semaines pour s’y opposer. L’Etudiant fait le point.
Moins d’argent mais toujours plus de colère. Comme dans d’autres domaines en France, le monde étudiant fait face à d’importantes mesures d’austérité qui inquiètent autant les étudiants que le corps enseignant. Faute de soutien budgétaire suffisant de la part du gouvernement Bayrou, de nombreuses universités se retrouvent déficitaires. Au total, les coupes s’élèvent à plus d’un milliard d’euros pour le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Début avril, le conseil d’administration de la faculté de Rennes 2 (35) a donc par exemple voté un plan de retour à l’équilibre financier ”pour éviter une mise sous tutelle du rectorat [...] et de nous priver de notre autonomie financière et politique”. Conséquences ? Une partie des filières de l’enseignement à distance sont supprimées et près d’une trentaine de postes sont gelés.

Un mouvement d’ampleur nationale
Une situation inacceptable pour les élus de l’Union Pirate, syndicat étudiant, qui n’a pas cessé de se mobiliser contre ces décisions au travers de manifestations et de blocage de certains établissements. “Ça montre à quel point les gens ont peur pour la santé de l’enseignement public”, expliquent Tao et Arnaud, étudiants et représentants du syndicat rennais majoritaire, très actif dans le milieu militant local.
Paris, Toulouse, Bordeaux, Poitiers… Comme à Rennes 2, de multiples mouvements ont émaillé le territoire français ces dernières semaines. Si tous les établissements ne font pas face aux mêmes problématiques, certains reviennent régulièrement, comme la baisse du nombre de places disponibles, la fragilisation des conditions d’enseignement ou encore la mise en difficulté de certains étudiants. “C’est une situation très inquiétante car on précarise des personnes qui étaient déjà dans une situation compliquée, estiment Tao et Arnaud, interrogés en pleine période d’élections. Eux citent par exemple le cas des étudiants extracommunautaires ou des thésards, particulièrement sensibles à de tels changements. On appelle à nouveau à manifester. En attendant, il faut continuer d'informer, de rappeler à tous qu'on ne lâchera pas.”
Reste qu’il est difficile de mobiliser une fois un plan d’austérité voté. C’est en tout cas l’avis de Cathy, étudiante en master et présidente du Souffle à Sciences po Toulouse (31), bloquée pendant une semaine courant février, juste après l’adoption du budget : “Ç'a été l’occasion de faire valoir certaines revendications, comme le maintien du personnel d’aide psychologique. Mais on n’a aucun pouvoir, la situation nous écrase tellement et touche tout le pays... Même si, il faut l’avouer, ici, on est bien mieux lotis qu’ailleurs.”
Un dialogue parfois difficile
Une situation qui cristallise souvent les tensions entre la direction universitaire et les étudiants, surtout à l’approche des examens. Anne*, élue du syndicat Unef à Bordeaux-Montaigne (33), témoigne d’un dialogue compliqué avec la présidence de l’université. “L’établissement est bloqué depuis fin mars. Ce n’est pas la solution que nous privilégions, mais, dans le même temps, on désapprouve totalement les méthodes employées qui visent à diviser les étudiants. Au contraire, nous voulons apaiser la situation, qu’il y ait des compromis.” D’autant plus que la police est déjà intervenue pour lever temporairement l’occupation des lieux il y a quelques semaines.
Tao et Arnaud, étudiants à l’université de Rennes - ex Rennes 1 - voient eux une différence de traitement avec Rennes 2, beaucoup plus permissive sur la mobilisation. Celle-ci a par exemple fini par accorder une dispense d’assiduité aux étudiants souhaitant manifester. “La présidence a toujours permis à ce type de mouvement d’exister. Même si les forces de l'ordre sont intervenues il y a quelques semaines sur le campus. Ce n’était pas arrivé depuis très longtemps… A contrario, à Rennes 1, les rapports ne sont absolument pas du tout les mêmes. C’est tolérance zéro.”
Quelque peu désabusée, Cathy estime pourtant que ces coupes budgétaires ont des conséquences désastreuses sur l’enseignement supérieur, à court, moyen et long terme. “On met de moins en moins d’argent dans l'université, la formation et la jeunesse en général. Ces mesures, ça touche aussi le corps enseignant et la recherche. Ce qui veut dire, par exemple, moins de chercheurs en sciences sociales et donc, moins de gens pour alerter sur les inégalités dans la société. Et ça, ça m’inquiète beaucoup.”